#AÉSIO se mobilise

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Perte de goût et d’odorat : Aésio a participé à un atelier de "réveil olfactif"

Depuis 15 ans, les spectacles multi-sensoriels de Violaine de Carné proposent aux spectateurs de questionner leur rapport aux odeurs. La pandémie de Coronavirus l’a incitée à créer des ateliers pour aider les patients atteints d’anosmie. Très intéressée par cette démarche thérapeutique, AÉSIO mutuelle a décidé de participer à ces Ateliers de rééducation.
Atelier olfactif Covid long - pipettes de parfums

© photo Juliette Avice

Anosmie persistante : combien de temps dure la perte d’odorat dû au Covid ?

La perte du goût (agueusie) et celle de l’odorat (anosmie) sont des symptômes fréquents du Covid-19. Une grande majorité d’entre nous retrouve rapidement ces sens. Pour certains, le temps de récupération est tardif : on parle alors de Covid long. Selon une étude 2020 de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), 60 % des patients hospitalisés présentent au moins un symptôme persistant après 6 mois.

Violaine de Carné, la fondatrice de la compagnie de théâtre Le TIR et la Lyre propose des spectacles « olfactifs » (« La Belle et la Bête », « L’Encens et le Goudron ») depuis 15 ans, dans des lieux de théâtre traditionnels ou hors les murs. Elle a également intégré le projet KŌDŌ, projet scientifique, philosophique et artistique, financé par l’Agence nationale de la recherche (ANR), autour d’une esthétique olfactive.

Comment retrouver l’odorat après un Covid long ?

La pandémie de coronavirus l’a incitée à créer des ateliers pour aider les patients atteints d’anosmie, donc de perte de l'odorat. AÉSIO mutuelle a décidé de participer à ces Ateliers de rééducation.

C’est ainsi que nous nous retrouvons un soir en semaine dans une salle de réunion parisienne. Violaine nous l’annonce avec un grand sourire : « Il s’agit ici de travailler ! ».

Petit tour de table et présentation des participants et participantes.

Nous sommes toutes et tous touchés par l’anosmie, avec parfois une perte d’odorat depuis plus de 6 mois. Cela commence à être long et parfois désespérant pour certains. Une participante raconte : « Je n’ai quasiment pas progressé ». Une autre ajoute : « Il m’arrive parfois de sentir, mais dans l’ensemble cela stagne ».

© photo Juliette Avice

Roland Salesse, ingénieur agronome, directeur de recherche à l’Inra et qui dirige des recherches dans le domaine de l’odorat, collabore depuis des années avec Violaine.
Il nous explique : « Le nez n’est qu’un réceptacle de molécules. En réalité, c’est le cerveau qui a le pouvoir. Dire que l’on sent avec le nez, c’est comme réduire un pianiste à des mains ». Il précise : « En réalité, c’est le cerveau qui sent, analyse et imagine, qui est capable de travailler en synesthésie et relier les autres sens ».

La plupart des participants désespère : tout semble avoir le même goût de papier carton ! ”

Violaine DE CARNÉ Coach

Atelier de récupération de l’odorat après le Covid-19 : miser sur les émotions

À partir de là, le chemin de guérison qu’emprunte l’atelier passe plutôt par les émotions que par celui de la connaissance.

Munie de son odorothèque secrète, co-conçue avec le nez Laurence Fanuel, Violaine distribue des mouillettes aux participants.

Elle nous interroge  :

  • « Cette odeur est-elle agréable ou désagréable ? »
  • « Répulsive ou attirante ? »
  • « À quoi vous fait-elle penser ? »
  • « Comment la qualifiez-vous avec des mots, des couleurs, des sensations, des souvenirs… »

Grâce à notre grille d’analyse, nous couchons sur papier nos ressentis. Une odeur animale musquée, une note végétale fraîche, un autre thème plus gourmand et plus alléchant… Au début, la plupart des participants sont un peu égarés. La construction mentale est un peu chaotique.

Progressivement, les ressentis se précisent et aboutissent de façon plus nette. Chacun témoigne verbalement : Odeur n°7 poudre de riz à l’Opéra de Paris, Odeur N°4 banane verte écrasée, Odeur N°5 herbe fraîchement coupée, Odeur N°4 cuir de selle de Rambouillet, etc.

Violaine de Carné agit comme un coach de l’émotion olfactive, afin de reconstituer le souvenir de l’odeur, pas à pas.

Pour éviter les risques de saturation (nous sentons entre 8 et 10 parfums par séance), nous apprenons à sentir la peau de notre coude (la partie la plus proche de notre propre odeur).

Au premier atelier, vos analyses et réactions sont un peu embrouillées. C’est normal. Il s’agit ensuite au fil de vos recherches de vous remettre sur la bonne voie de l’odorat. Mon objectif est de vous ré-aiguiller. ”

Violaine DE CARNÉ

Le "training olfactif" : sentir, c’est vivre à nouveau !

Chez certains participants, le souvenir apparaît subitement comme par miracle. Chez d’autres, c’est un peu plus long.

Mais dans tous les cas, les résultats sont probants. Au bout de 2 séances, on assiste déjà à de réels progrès qui résonnent comme de véritables victoires pour certains participants : « J’ai enfin pu sentir mon parfum ce matin ! », « Cela sentait bon le gâteau au chocolat dans cette boulangerie, cela m’a fait plaisir ! ».

Violaine de Carné l’assure : « Il existe des techniques de rééducation permettant d’entretenir le lien entre les neurones olfactifs endommagés et les fonctions cognitives. Il faut juste mettre en route le plus rapidement la rééducation car cela reste pour le moment le seul traitement ayant prouvé son efficacité. ».

Dans tous les cas, ce travail olfactif collectif se révèle être un travail d’exploration pertinent permettant également de révéler les singularités de chacun (on apprend également que la perception de l’odeur diffère d’une personne à une autre), de libérer des émotions passées et de réfléchir à mieux les convoquer au quotidien.

 
Nous sortons libérés de ces séances et avec l’envie de tout sentir au passage !

© photos - Juliette Avice