Santé au travail

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Manager : un rôle clé dans l’accompagnement des salariés aidants

Vivre une situation d’aide (génératrice de contraintes nouvelles pour sa vie personnelle et professionnelle) peut conduire dans certains cas à un épuisement physique ou psychologique du salarié aidant. Ceci peut avoir des conséquences importantes sur sa vie mais aussi sur celle du collectif de travail, qui peut être considérablement perturbé. Il est donc souhaitable de repérer et identifier le plus en amont possible les situations à risque et d’apporter une réponse adaptée avant que la situation du salarié ne se dégrade. C’est tout l’objet de la méthode dite « des signaux faibles ».

Repérer pour agir 

La méthode des signaux faibles

Elle repose sur une écoute active de petits signes qui s’invitent progressivement dans le collectif et la relation de travail. Cumulés, ces signes constituent un faisceau d’indices à prendre en compte. 
Voici une illustration des 3 niveaux d’attention principaux pour le manager. Les signaux évoluent de façon graduée et induisent une réponse adaptée.

Niveau 1 (Alerte)  

Le collaborateur s’implique moins dans la vie de l’équipe : moins d’initiatives, prise de parole réduite en réunion…

Le collaborateur est plus lent dans son activité et réclame davantage de cadrage (points réguliers…)

Le collaborateur commet des erreurs grossières, perd confiance et augmente son amplitude horaire.

Questions à se poser :

  • Est-ce que j’observe des changements chez le collaborateur ?
  • Est-ce que j’ai connaissance de changements dans la vie du collaborateur ?
  • Est-ce que l’équipe m’en a parlé ?
  • Quel type d’impact ces changements ont-ils sur le collectif de travail ? Sur la performance de mon équipe ?


Ce qu’il convient de faire :

Lorsque l’on observe ce type de signaux, il ne faut pas hésiter à mener l’enquête pour comprendre l’origine du comportement du collaborateur. Le plus simple est encore de faire un point avec lui, afin de mieux appréhender son quotidien et de lui témoigner votre attention.

A ce stade, il n’est évidemment pas tenu de parler ou de partager sa situation, c’est la raison pour laquelle vous devez laisser « la porte ouverte » et le cas échéant lui faire comprendre qu’il pourra revenir vous parler lorsqu’il sera prêt.

Lorsque la parole se libèrera, il faudra alors clarifier les différents éléments qui posent des problèmes (aspects personnels/ professionnels), de façon à imaginer des solutions (à coconstruire si besoin avec les RH).

Niveau 2 (Alarme)

Le collaborateur évite les situations de vie informelle dans l’entreprise : mange seul, n’est jamais libre, reste silencieux.

Le collaborateur sur-réagit aux critiques, est irritable et ne supporte plus des éléments autrefois anodins (bruit, température des locaux) 

Le collaborateur s’oppose de plus en plus frontalement à la hiérarchie et n’hésite pas à faire porter le chapeau à l’équipe.

Questions à se poser :

  • Est-ce que le collaborateur se coupe du collectif de travail ?
  • Est-ce que cela reste circonscrit au seul plan professionnel ?
  • Maintient-il une vie sociale ?

Ce qu’il convient de faire :

La situation peut rapidement basculer, ce qui nécessite de la part du manager de revenir à la philosophie du contrat de travail, en laissant une moindre place à l’affectif et en privilégiant les relations professionnelles.

Dans cette optique, les différents débordements doivent faire l’objet d’un rappel aux règles du collectif. C’est l’une des conditions essentielles d’un traitement juste (et éthique) de l’ensemble de l’équipe.

Niveau 3 (Crise)  

Le collaborateur ne participe plus à la vie collective professionnelle (formations, convention, séminaire…) 

Le collaborateur ne respecte plus les règles collectives et n’hésite plus à s’absenter sans raison.

Le collaborateur multiplie les absences, fait preuve de plus en plus de cynisme et peut avoir des pensées suicidaires.

Les questions à se poser :

  • Qu’est-ce qui, dans le comportement du collaborateur, échappe aux obligations de son contrat de travail ?
  • Comment l’équipe réagit -elle ?

Ce qu’il convient de faire :

Les débordements doivent être systématiquement sanctionnés, à travers des points réguliers et motivés permettant de préciser et signifier les problèmes rencontrés.

Il pourra parallèlement être utile de faire part des soucis rencontrés auprès de la ligne hiérarchique, à travers une demande d’entretien par exemple avec la personne concernée.  

Accompagner un collaborateur aidant

Gérer un collaborateur confronté à une situation d’aide familiale peut être particulièrement exigeant. Cela oblige à comprendre une situation d’accompagnement d’un proche malade, âgé ou dépendant qu’on ne connaît pas et qui peut conduire à des changements parfois significatifs.

Les risques

Cela induit aussi parfois la tentation d’aider et soutenir spécifiquement le collaborateur aidant, ce qui peut conduire à faire évoluer le regard de l’équipe sur lui.

Il devient ainsi un objet d’attention particulier, ce qu’il peut vivre comme dévalorisant.

Dans ce contexte, le manager peut être confronté à des jeux psychologiques dont le plus connu est sans doute le triangle dramatique.

Dans ce contexte, vous pouvez ainsi vous retrouver en situation de :

Sauveteur du salarié : en allant parfois plus loin que celui-ci ne le demande, ou en sortant des règles édictées par l’organisation (accorder des heures « en off », accepter un retard sur une mission…) Mais aussi de :
Persécuteur du salarié : en revenant sur des acquis ou des pratiques qu’il n’accepte plus ou en refusant des demandes sortant du cadre de travail (demande de jours hors contrat, horaires incompatibles avec le fonctionnement de l’organisation)
Victime du salarié : en vous voyant accusé d’incompréhension ou de manque d’empathie lorsque la situation dérape (absences répétées, aggravation de l’état du proche…)

Lorsque l’une de ces situations se présente ou lorsque vous avez l’impression que vous êtes entré dans ce type de jeu, il faut, dans la mesure du possible, revenir à des choses rationnelles et objectives. C’est la seule façon de ne pas envenimer la situation et d’en sortir au mieux des intérêts de chacun.

Et pour cela, apprendre dans la relation à refuser systématiquement tout ce qui relève de la dramatisation excessive, de la plainte ou de l’émotion pour en rester le plus près possible des faits.

En premier lieu, se concentrer sur ce qui est prévu au contrat de travail : quel est le contenu du poste de la personne, que lui demande-t-on, quels sont ses besoins et attentes pour mener à bien sa mission ?

Quelques pistes simples d’actions complémentaires pour poser des actes de management qui soient les plus justes possibles :

Lorsque la situation vient juste d’être connue ou fait l’objet d’un changement de nature à fragiliser le collaborateur (rechute de son proche, aggravation de l’état de santé…) :

  • Evoquer la situation avec l’équipe (après entente avec le collaborateur concerné sur sa situation et ce qu’il souhaite faire savoir).
  • Prendre en compte la surcharge de travail de l’équipe, piloter la répartition du travail pour pallier l’absence du collaborateur ou suivre son travail (binômes).
  • Éventuellement identifier les solutions pour pourvoir au remplacement (CDD, intérim).
  • En parler (en réunion d’équipe) pour écouter, voir les réactions et parfois obtenir des informations complémentaires.

Lorsque la situation s’installe dans la durée :

  • Evaluer les impacts de la situation sur les objectifs de l’équipe pour, le cas échéant, opérer des ajustements ou des correctifs.
  • Rester attentif au climat général, notamment durant les réunions d’équipe ou les temps informels : comment se passent les relations entre le groupe et le collaborateur ?  Y a-t-il des tensions ou au contraire des liens plus forts qu’avant ? …

Et bien-sûr, vis-à-vis du salarié aidant, vous pouvez, lorsqu’elles existent, lui faire part des solutions existant dans l’entreprise et pour cela échanger avec les RH sur ce qu’il est possible de faire.