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Mon enfant est harceleur, que faire ?

Le harcèlement, chaque parent y pense et craint que son enfant en soit la victime. Cependant, pour quelques-uns d’entre eux, l’épisode douloureux se vivra du côté du coupable. Comment comprendre et accompagner un enfant responsable de harcèlement ? AÉSIO mutuelle vous donne les clés pour comprendre et agir.

Comprendre les raisons du harcèlement 

La plupart du temps, en tant que parents, nous avons du mal à imaginer que notre enfant puisse être responsable d’un tel acte. Passé le choc de l’annonce, vous pensez immédiatement à l’idée d’une faille éducative. Où ai-je commis une erreur ? Qu’ai-je fait de mal pour que mon enfant puisse en arriver là ?

Déculpabilisez-vous, l’éducation est très rarement la cause de ce comportement. Cependant, il va falloir mettre des mots sur ses actes et poser un cadre. 

Ayez une conversation calme et constructive avec votre enfant. Vous êtes au courant de ce qu’il a fait, vous voulez comprendre les raisons pour lesquelles il les a faites. N’hésitez pas à aborder des notions telles que la responsabilité de ses actes, la méchanceté dont il a pu faire preuve et la gravité de la situation, tant d’un point de vue légal que comportemental. 

Installer un climat de confiance est le premier pas. Sans être conciliant, vous devez lui expliquer que vous souhaitez comprendre et l’aider pour que son comportement s’arrête. Cependant, votre champ d’action va être limité, car votre affect va s’interposer entre votre rôle de parent protecteur et l’obligation de régler cette situation. Vous ne pouvez pas être à la fois juge et partie. 

Accompagner son enfant 

Pour mettre en lumière une explication à ce comportement déraisonnable, consulter un professionnel de santé, psychologue le plus souvent, est conseillé.

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Un terrain neutre et bienveillant, parallèlement aux mesures institutionnelles et familiales, permet à l’enfant de se rendre compte de la portée de ses actes, de comprendre la souffrance de la victime et de s’ouvrir à l’empathie. Ces consultations aident parfois à dévoiler une dynamique négative que votre enfant peut vivre même si vous pensiez que tout allait bien.

Des études montrent par exemple une corrélation entre l’acte de harcèlement comme une expression du mal-être (Harceleurs et harcelés : des expressions du mal-être différentes - Presses de Sciences Po). 

Le suivi thérapeutique donne un espace d’écoute à votre enfant pour que son comportement ne se reproduise pas. L’objectif est de comprendre l’origine de cette attitude. Cet engagement prouve également, aux yeux des victimes et de la loi qu’il souhaite changer et ne pas continuer à faire souffrir les autres. 

Les mesures institutionnelles face à l'enfant harcelleur

Du côté de l’Éducation nationale, un protocole a été instauré pour prendre en charge le harceleur. En fonction de la nature et de la gravité des actes, après avoir établi les faits entre la victime et le coupable, le ou la responsable de l’établissement dispose d’un ensemble de sanctions éducatives (blâme, exclusion temporaire ou définitive) mais également de mesures d’accompagnement. 

La commission éducative 

Différente du conseil de discipline, cette commission examine la situation d’un élève qui ne respecte pas les règles de vie du lycée. Elle cherche ensuite une solution éducative adaptée et personnalisée au regard de la gravité de la faute commise. 

Les mesures de responsabilisation 

La mesure de responsabilisation est une sanction éducative. Elle est proposée comme alternative à l’exclusion temporaire de la classe ou de l’établissement. Elle consiste pour l’élève auteur de harcèlement à prendre conscience des effets de ses actes sur les victimes. Il se voit proposer par exemple de suivre une formation dans la police ou dans la gendarmerie, de participer à des activités caritatives ou de prendre en charge l’accueil dans un lieu de vie.

Vers qui se tourner ? 

Solliciter un médiateur auprès des pouvoirs publics 

— Appeler les numéros d’aide

  • Le 3020 : anonyme et gratuit, il vous permet d’entrer en contact avec des conseillers spécialisés.
  • Le 3018 : par téléphone, Messenger ou WhatsApp, ou en téléchargeant l’application, vous êtes orienté du lundi au samedi, de 9h à 20h en toute confidentialité. 

La parole à l’expert : « Prenons en charge la souffrance de l’auteur de harcèlement » 

 

Entretien avec Hélène Romano, psychologue, docteure en psychopathologie, docteure en droit privé et sciences criminelles et auteure de « Harcèlement en milieu scolaire. Victimes, auteurs, que faire ? » aux éditions Dunod.  

Peut-on « catégoriser » les harceleurs ? Ont-ils tous le même profil ? 

Trois profils émergent de mon expérience.

La grande majorité, environ 80%, sont les suiveurs, ceux qui font « comme les autres ». Ils veulent être acceptés et intégrés dans le groupe, ils vont donc suivre le meneur et devenir - de fait - harceleurs.

Ensuite on trouve les harcelés–harceleurs. Ils ont été (ou sont encore) harcelés et reproduisent ce qu’ils ont vécu en devenant à leur tour harceleurs. Ils représentent environ 10% des enfants.  

Enfin, les 10% restants, les meneurs, souffrent, de véritables troubles liés à des problèmes éducatifs ou de personnalité. Un manque de culpabilité ou manque d’empathie qui s’enracine dans une forme de mal-être plus profond. 

Pourquoi et comment aider mon enfant harceleur ?  

Parce que ce sont des enfants qui sont en souffrance. Ils ont une insécurité psychique très forte, ils ne gèrent pas la frustration et tout ce qui risque de les faire bouger représente un danger. Ils sont ainsi dans une situation de mal-être.

Un enfant qui va bien n’a pas besoin de harceler. A partir du moment où il se sent en danger, que « l’autre » représente un danger, il faut le détruire ou le faire souffrir. 

Même si chaque cas est unique, la prise en charge dépend du profil du harceleur. 

Dans la grande majorité des cas - les suiveurs – des groupes de parole permettent de les éveiller à l’empathie et mettre des mots sur des émotions. 

Les enfants des deux catégories suivantes doivent être pris en charge individuellement. 

Les harcelés-harceleurs reproduisent une violence subie. C’est une blessure traumatique passée ou présente qui (ré)active le besoin de blesser à son tour. 

Dans le cas des meneurs, les cas les plus graves, ils reproduisent une violence qu’ils vivent dans le cadre familial ou proche d’eux. Ils ont été blessés et ne savent pas comment développer une attention particulière à l’autre.  

Que se passe-t-il si on fait l’impasse sur cet accompagnement psychologique ? 

Ne pas comprendre les causes qui ont amené votre enfant à devenir un harceleur, c’est le condamner à rester dans cette posture.

La sanction (car il doit y avoir une sanction) sans compréhension entraîne la récidive. Il faut donner du sens au passage à l’acte. 

La plupart du temps, faire prendre conscience à l’enfant de ce qu’il a fait, verbaliser la situation, placer les émotions au centre des temps de parole, et avoir un éveil à la sensibilité va permettre de résoudre collectivement (parents et enfants) ce passage difficile. 

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