Infarctus : reconnaissez les symptômes féminins
Les causes d’un infarctus du myocarde
L’infarctus du myocarde se déclenche par l’obstruction d’une artère (artère coronaire) qui alimente le cœur en sang et en oxygène. Ainsi, une partie des cellules musculaires du cœur meurent sans oxygène. Cela déclenche donc des problèmes de contraction du muscle cardiaque, entrainant ainsi divers symptômes dont des troubles cardiaques, une insuffisance cardiaque et dans certains cas l’arrêt du cœur.
D’après la Fédération Française de Cardiologie, les trois facteurs de risque sont le sexe, l’âge et l’hérédité.
Faisons le point avec le Dr. Yves El Bèze, directeur médical de l’Institut Cœur Paris Centre en France.
Lorsqu’une femme fait un infarctus du myocarde (crise cardiaque), ses symptômes sont-ils différents de ceux d’un homme ?
Les signes typiques d’alerte d’un infarctus correspondent à une douleur aiguë et persistante au niveau de la poitrine, qui irradie le bras gauche, le dos et la mâchoire. Ou également peuvent survenir un malaise, des nausées, des vomissements et la sensation de vertiges.
Les symptômes chez la femme peuvent être différents de ceux d’un homme, tout dépend de l’âge de la patiente. Avant la ménopause, une femme qui fait un infarctus du myocarde ressent, le plus souvent, des symptômes "typiques". Autrement dit : une douleur située au milieu du thorax, constrictive (impression de serrement), spontanée, durable et qui est souvent accompagnée de troubles digestifs.
Après la ménopause, les symptômes de crise cardiaque chez une femme sont plus complexes à interpréter, y compris par un médecin ou cardiologue :
- Certaines peuvent ressentir des douleurs isolées à l’épaule assimilables à de l’arthrose ;
- Des maux digestifs pendant ou après l’alimentation (nausées, vomissements) qui seront attribués à l’existence d’un ulcère ou d’un reflux ;
- Les bouffées de chaleur ;
- L’essoufflement ;
- La fatigue liée aux petits efforts de la vie quotidienne, ou la fatigue plus importante liée aux efforts lors d’activité physique sont également des signes d’alertes d’infarctus.
Mais ces signes sont généralement mis sur le compte de l’avancée en âge des femmes…
Plusieurs études ont montré que l’infarctus est moins bien diagnostiqué chez les femmes que les hommes. Est-ce lié à cette différence de symptômes ?
Le diagnostic chez les femmes est différent, par rapport aux hommes. En effet, un médecin sera plus sensible au risque d’infarctus chez un homme que chez une femme (à profil cardiovasculaire et à situation équivalente), car les femmes restent victimes de l’idée selon laquelle leur cœur est protégé par leurs hormones (les œstrogènes). Ce qui est vrai avant la ménopause. En revanche, après la ménopause leur santé cardiaque est fragilisée.
Toutefois, l’association de la pilule et du tabac augmente le risque d’infarctus du myocarde (crise cardiaque) et d’accident vasculaire cérébral.
Une femme qui fait une crise cardiaque sera prise en charge en moyenne 1 heure plus tard qu’un homme pour les mêmes symptômes !
Dans un premier temps, il est essentiel de sensibiliser les femmes qui présentent des facteurs de risque cardiovasculaire : fumeuses, stressées, hypertendues, diabétiques ou dyslipidémiques (c’est-à-dire une concentration trop élevée de lipides dans le sang, ou en surpoids). ”
Quelles sont les conséquences d’un mauvais diagnostic, ou d’un diagnostic tardif dans le cadre d’un infarctus du myocarde chez les femmes?
Un diagnostic précoce permet aux patients de recevoir un traitement adapté le plus vite possible, idéalement dans les 3 premières heures. L’objectif est d’éviter que l’infarctus s’étende et de limiter ses complications immédiates : troubles du rythme cardiaque, décès…
Par ailleurs, une étude anglo-suédoise a récemment mis en évidence qu’après un infarctus, les femmes sont moins bien suivies que les hommes. À titre d’exemple, le traitement classique "bétabloquants, statines, aspirine" est beaucoup moins prescrit aux femmes qu’aux hommes après une crise cardiaque.
Là encore, recevoir les soins et traitements adaptés permet d’éviter les complications à moyen et long terme, au premier rang desquelles le risque de récidive.
Les maladies cardiovasculaires sont responsables de 8 fois plus de décès chez les femmes que le cancer du sein et constituent la 1ère cause de mortalité/décès chez les femmes en France.
Comment lutter contre ces inégalités ?
Dans un premier temps, il est essentiel de sensibiliser les femmes qui présentent des facteurs de risque cardiovasculaire (fumeuses, stressées, hypertendues, diabétiques, dyslipidémiques, c’est-à-dire une concentration trop élevée de lipides dans le sang, ou en surpoids). Si elles ressentent les symptômes mentionnés plus haut, elles doivent consulter un médecin ou cardiologue pour réaliser un bilan et une évaluation afin d’éviter d’importants problèmes.
Ensuite, surtout en ce qui concerne la prise en charge post-infarctus, il est nécessaire que les médecins analysent leur pratique. L’enjeu ? Comprendre d’où proviennent les inégalités de prise en charge pour mieux y remédier.
Les chiffres clés de l’infarctus du myocarde
D’après une étude de la Fédération Française de Cardiologie on compte en moyenne 80 000 infarctus du myocarde chaque année en France, hommes et femmes confondus, dont 12 000 décès.
Quelles sont les règles d'or en matière de prévention des maladies cardiovasculaires chez les femmes ?
Loan Vo Duy, co-présidente de la commission Cœur de Femmes de la Fédération Française de Cardiologie, & le Dr. Catherine Monpère ont accepté de répondre à nos questions sur les risques de maladies cardiovasculaires chez les femmes : spécificités, symptômes, facteurs de risques, ou encore récidives.
Découvrez nos Questions/Réponses sur ce sujet important.
Les décès par maladie cardiovasculaire sont en nette régression depuis plusieurs années, avec une régression de 50% au cours de cette dernière décennie et cela tant pour les hommes que pour les femmes. En revanche, il existe des aspects plus préoccupants à savoir que cette baisse des décès est beaucoup moins marquée dans les populations des femmes les plus jeunes, que le nombre d’hospitalisations est nettement croissant dans les populations des femmes jeunes (c-à-d de moins de 55 ans). Ainsi, la fédération Française de cardiologie a mis en place une commission intitulée Cœur de Femmes qui a pour missions de rechercher les causes de cette évolution en défaveur des femmes sur les maladies cardiovasculaires et de les traiter lorsque c’est possible.
Les facteurs de risques traditionnels liés à son âge, à l’hérédité, à son sexe (non modifiables) et les facteurs de risques modifiables sont les mêmes que pour les hommes. A côté de ces facteurs de risques traditionnels, la femme va avoir tout au long de sa vie génitale des facteurs de risques liés à ces différentes étapes (puberté, les pathologies de grossesse, la ménopause…). Et également chez les femmes, le rôle du stress, en particulier le stress aigu, qui peut être à l’origine d’infarctus très spécifique chez la femme.
Tous ces facteurs de risques peuvent être diminués voir disparaitre par une activité physique régulière.
Celle qui est la plus impactante et qui est lourde de conséquences concerne essentiellement les infarctus survenant chez les femmes jeunes. En effet, on sait bien que la protection hormonale par les œstrogènes est réelle. En revanche, les facteurs de risques vont rogner cette protection, comme le tabac par exemple, qui font qu’on va sous-estimer le fait de développer une maladie cardiovasculaire.
Le risque de récidive après un premier infarctus est majeur. Et cette prévention est le fait de la réadaptation cardiovasculaire que l’on doit proposer aux patientes après leur accident cardiaque. Cette réadaptation consiste à proposer un programme individualisé. Le but est de mettre en place avec la patiente un programme adapté à ses goûts, sa motivation. Cette réadaptation va également lui apporter une aide psychologique, ou l’aider si c’est le cas, dans sa réinsertion professionnelle. Ce passage privilégié, de 3 ou 4 semaines, devra lui donner un mode d’emploi qu’elle puisse ensuite mettre à profit dans son quotidien.
Insuffisamment. Cela justifie le travail fait en coopération avec AÉSIO et la Fédération Française de Cardiologie. L’essentiel que l’on doit faire pour améliorer cet état de fait est l’information. Également, augmenter tout ce qui va dans le cadre des recherches. Actuellement, lorsque l’on regarde dans les études qui sont publiées sur les maladies cardiovasculaires, on est étonnés de voir que les femmes sont à la portion congrue. Le plus souvent les études ne peuvent pas conclure de façon définitive sur l’apport de telle ou telle thérapeutique, innovation chez les femmes parce qu’elles ne sont pas suffisamment incluses dans les études.
Dans 80% des cas, les symptômes sont typiques. C’est une douleur qui est derrière le sternum, qui serre, qui va dans le bras gauche et qui monte dans le cou ou la mâchoire. En revanche, ces symptômes peuvent quelques fois être moins typiques. Par exemple intéresser le côté droit, et surtout être noyés dans un nombre important d’autres symptômes comme des nausées, des douleurs digestives, être précédés d’une fatigue anormale. Tous ces éléments font que cela peut noyer un peu le diagnostic et le retarder.
Il y a des spécificités qui sont à connaître, mais la première des choses à faire et de donner accès à l’information. Lors d’interventions techniques on s’est rendu compte que souvent chez les femmes, les rétrécissements au niveau des artères coronaires étaient beaucoup plus en aval, qu’il était donc assez difficile d’intervenir. Ou encore le stress aigu qui peut entrainer des dissections de la paroi des artères coronaires, que là aussi on va retrouver 9 fois sur 10 chez la femme, et qui nécessite un traitement spécifique.
Au niveau de la prise en charge, au niveau du diagnostic, maintenant, l’imagerie permet d’avancer largement et on a montré que les femmes avaient moins recours à ces tests diagnostics. Tout simplement parce que le professionnel de santé ne croit pas réellement à la réalité de la pathologie.
Il y a 20% de récidive la première année. Il est évident que la prévention secondaire est essentielle. L’importance actuellement est de pouvoir ouvrir d’autres modalités de réadaptation cardiaque.
Actuellement la réadaptation cardiaque est portée essentiellement par des établissements de soins de suite et de réadaptation qui nécessitent soit d’être hospitalisée pendant 3 à 4 semaines, soit de venir en hôpital de jour sur plusieurs semaines consécutives.
Chez les femmes, les obligations familiales font autant de barrières à cette prévention secondaire qui est pourtant majeure. C’est la raison pour laquelle la fédération française de cardiologie a mis en place des solutions alternatives qui permettent par télémédecine, de proposer des télé réadaptations à domicile.
Cette amélioration de la prévention secondaire va passer par ces formes nouvelles de réadaptation cardiaque.
Au départ, c’était le cardio-training et maintenant : la gymnastique douce dans l’eau, la danse (country, zumba…), le qi gong, le taï chi, la marche (en ville, en forêt, nordique…).
Du lundi au samedi.
Les missions des Club Cœur et Santé sont la prévention, la sensibilisation du grand public. Car quand on interroge les femmes seulement 79% savent que les maladies cardiovasculaires sont la 1ère cause de mortalité des femmes.
Le rôle des Club Cœur et Santé c’est le rôle de proximité. Des médecins cardiologues effectuent les recherches et puis nous relayons ces informations, facile à comprendre pour le grand public.
Les Club Cœur et Santé ont été créés dans les années 70 parce que les cardiologues trouvaient qu’il y avait énormément de récidive.
Les Club Cœur et Santé sont gérés par deux personnes : un responsable non-cardiologue parrainé par un cardiologue (appelé cardiologue référent). Les responsables sont généralement des anciens patients.
En 20 ans, la part des femmes chez les adhérents des Club Cœur et Santé a quintuplé.
Les actions mises en place font écho aux facteurs de risques. Les signes d’infarctus et d’AVC ne sont pas connus du grand public. Et ce sont des campagnes qui vont permettre aux femmes de mieux connaître, de bien maîtriser, pour pouvoir permettre au corps médical d’intervenir plus tôt. Et il y a aussi les gestes qui sauvent et ça c’est pour que femme ou homme soit familiarisé avec le geste du massage cardiaque et dédramatise ce geste-là.
Le tabagisme. Baisser, arrêter ou réduire son tabagisme à des effets immédiats. Ensuite, il y a la sédentarité. Plus on bouge, plus les vaisseaux sont en bonne santé. Surtout en avançant en âge. Le troisième point, c’est l’alimentation. Une femme sur deux sait que l’alimentation est importante, mais moins d’une femme sur trois mange 5 fruits et légumes par jour. Ensuite, c’est l’isolement social. C’est un fait important pour les femmes. L’isolement c’est : ne pas sortir, ne pas faire d’exercice. Puis, les femmes sont très vulnérables au stress. Le stress en milieu social, en famille, en milieu professionnel. Par exemple, les femmes sont beaucoup plus vulnérables face au harcèlement moral etc. Réduire son stress, cela passe par la détente, par le rire, par la bonne humeur, par la vie associative.
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La Fédé Française de Cardiologie et AÉSIO mettent le cœur des femmes à l’honneur 346.8 Ko - PDF
Webconférence #SemaineDuCœur ❤️ de la FFC et Aésio - 29/09/2020