#Changer de regard

Temps de lecture estimé : 5 minutes

Les Français et le pain : je t'aime, moi non plus

Chaque jour, 12 millions de clients entrent dans une boulangerie. 6 milliards de baguettes sont fabriquées chaque année. Nourrissant, essentiel à l’équilibre des repas selon les autorités de santé, il est aussi accusé de faire grossir et de moins en moins consommé par les Français.
Le pain, nous l’adorons, et pourtant, nous le connaissons si mal !!
Petite fille qui croque une tartine de pain et confiture

Le pain est l’objet d’un paradoxe. Selon les sondages, son image est très positive avec 97% des Français contents de trouver du pain frais à table. Pourtant, la consommation ne cesse de baisser : en 10 ans, les Français ont diminué de près de 1/4 leur consommation. En cause, les évolutions des comportements alimentaires.

Une étude¹ réalisée en février dernier pour la Fédération des Entreprises de Boulangerie (FEB), analyse les évolutions de consommation du pain, en France, entre 2011 et 2015. 48% des sondés le reconnaissent : ils ne pourraient pas s’en passer !
Et pourtant, « l’achat et la consommation de pain sont à la baisse. » C’est le principal enseignement de cette enquête de l’institut QualiQuanti, intitulée Les Français et le pain, cinq ans plus tard. La précédente, en 2016, visait à mieux connaître et comprendre les consommateurs de pain.

Un tiers des Français pense que le pain fait grossir 

Intéressant pour ses apports en glucides complexes, fibres, protéines végétales et contributeur en différents nutriments, le pain est considéré par les autorités de santé comme facteur d’équilibre des repas. Il est aussi un fort contributeur en énergie.

Or, d’après une étude de l’Institut CSA et de l’Observatoire du pain [ici], les Français – et particulièrement les plus jeunes – méconnaissent ses qualités nutritionnelles, ce qui pourrait les amener à remplacer le pain par des produits plus gras et moins riches en nutriments !

Des contre-vérités qui perdurent

Le pain est un aliment à privilégier. Il apporte les nutriments nécessaires au bon fonctionnement de notre organisme.
Il est :

  • pauvre en matières grasses,
  • riche en glucides complexes,
  • contient des protéines végétales,
  • et des fibres.

Pourtant, à l’occasion d’un régime (44%), les Français sont 2/3 à avoir diminué les quantités de pain ou même stoppé sa consommation.
Or, selon le Dr Patrick Serog, « la population française est en carence de glucides complexes qui sont pourtant une source d’énergie essentielle pour l’organisme et le cerveau. Les conséquences peuvent être très concrètes en termes de fatigue, sans parler des prises de poids ultérieures car le pain est souvent remplacé par des aliments moins qualitatifs et plus gras ».

Voir l'infographie "Les Français & le pain"

Etude "Les Français et le pain", infographie

Des habitudes de consommation différentes

L’âge joue sur notre façon de consommer le pain

Si la population française est toujours aussi satisfaite de la qualité du pain acheté (96% en 2021 pour 95% en 2015¹), la consommation n’est pas répartie de façon équitable selon l’âge.

On peut expliquer ces changements de comportements grâce au concept de "génération", lorsque l’on sait qu’il y a des différences de comportements plus marquées entre 2 générations, qu’entre 2 classes sociales de la même génération.


Dans l’analyse du CRÉDOC ci-contre², les Français ont été partagés en générations de 10 ans (dont le nom a été choisi d’après les grands événements de leurs 20 ans en matière alimentaire).

Selon ces statistiques, si depuis 2003 les 20-40 ans continuent de manger moins de pain, à l’inverse les 40-75 ans ont augmenté leur consommation entre 2013 et 2016².

© source étude CRÉDOC

Une tendance confirmée par l’étude de la FEB¹, qui mentionne que la consommation de pain descend à « 32% pour les moins de 30 ans » et remonte à « 67% pour les plus de 60 ans ».

Des comportements d’achats qui bougent

La boulangerie indépendante reste l’endroit que les Français continuent le plus à fréquenter pour leur achat ; viennent ensuite les grandes surfaces (45%¹) et les réseaux de boulangeries (25%¹).
Les consommateurs favorisent un lieu proche de chez soi par facilité (un critère d’achat devenu plus important que la qualité, qui passe de 73% en 2015, à 63% en 2021), et en solidarité avec les petits commerçants, surtout depuis le Covid. Avec la pandémie, la consommation de pain a diminué (moins de snacking, de consommation de sandwichs), notamment à cause de la fermeture des restaurants et, plus marginalement, de la mode du "fait-maison".

Pour répondre à une clientèle plus jeune, les boulangeries innovent, avec le click & collect et la livraison à domicile.
La tendance anti-gaspi s’accélère et les réseaux de boulangeries y répondent : vente en lots, pain de la veille moins cher, baguettes "solidaires" (à déposer ou à récupérer)… Les Français sont d’ailleurs 52% à toujours avoir du pain au congélateur¹ !

Les Français veulent des informations plus claires

Cité à 96% comme un « incontournable du patrimoine culinaire français »¹, le pain - et particulièrement la baguette tradition, candidate à l’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco – est plébiscité par les Français.
Ils sont demandeurs d’une d’information plus claire sur la provenance des farines : « 73% demandent une farine issue de blé français » ainsi que pour des informations plus claires en magasin (53% vs 46% en 2015¹).
Les consommateurs sous-estiment la proportion de blé français dans le pain. Pourtant, 95% des farines utilisées en boulangerie viennent bien de l’Hexagone !

Notre pays est également un gros exportateur. « Sur les 39 millions de tonnes de blé produites en moyenne en France, 21 millions de tonnes partent à l’export tandis que 5 millions restent en France », précise Jean-François Loiseau, président de l’interprofession Intercéréales.

¹ chiffres de l’enquête « Les Français et le pain, cinq ans plus tard » (février 2020) - Institut Quali Quanti pour la Fédération des entreprises de boulangerie (FEB).
² étude CRÉDOC - Comportements alimentaires et consommation de pain en France - lien ici
 

Bientôt, un pain moins salé

Le pain, première source de sel dans notre alimentation

En France, c’est le pain qui nous apporte notre dose principale de sel, en raison de la consommation quotidienne moyenne que nous en faisons.

Si la recommandation est de 18 g de sel par kilo de farine, en pratique, selon une enquête de Que choisir Santé, le pain affiche plutôt une moyenne de 20-24 g de sel par kilo de farine. Une demi-baguette (120g - 130g, la consommation moyenne), elle, représente plus ou moins 2g de sel.
Or, les recommandations de l’OMS sont de consommer 5 g de sel maximum par jour par adulte, soit l’équivalent d’1 cuillère à café

De plus, si la teneur en sel est indiquée sur l’emballage du pain en supermarchés, dans nos boulangeries, ce n’est pas le cas !

© photo M.Grabkowska - Unsplash

Sel = hypertension + maladies cardiovasculaires

Le sel entraîne une augmentation de la pression artérielle (tension) et donc du risque de maladie cardio-vasculaire.

En diminuant votre consommation de sel, vous réduisez la sollicitation de vos artères et de votre cœur, ce qui éloigne le risque d’insuffisance cardiaque dû à une hypertrophie ventriculaire.

Des réglementations qui évoluent dans le bon sens

À l'occasion du Salon international de l'agriculture le 3 mars 2022, l’ensemble des acteurs de la filière boulangerie a signé un accord collectif dans le cadre du Programme national de l'alimentation et de la nutrition 2019-2023.
Le sel, à travers le pain, représente près « de 20% de l’apport en sel quotidien des Français », précise le Gouvernement.

L'objectif d’ici 4 ans : réduire d'environ 10% la teneur en sel dans nos pains !

Quelques exemples concrets, d'ici 2025 :

  • la baguette ne dépassera pas les 3,5 g de sel (une baguette faisant 250 g) ;
  • un pain complet de 400 g ne dépassera pas les 5,2 g de sel ;
  • une tranche de pain de mie ne dépassera pas les 0,38 g de sel (une tranche faisant 35 g).

Réduire la consommation de sel de 30% d'ici 2025 est un objectif pris par la France auprès de l’OMS.

Rédigé par : Delphine SANTINI